À Paris, le 16 Juin 2020, le gouvernement remercie les soignants par des tirs de gaz lacrymogène.
Il y a plus d’un an, le 18 mars 2019, le personnel des hôpitaux français était déjà dans la rue, tirant la sonnette d’alarme avec un constat clair: faute de ressources financières et d’effectifs suffisants, l’hôpital craque et les patients en souffrent voire en meurent.
Au cours de la crise du COVID-19, le 27 février 2020, le docteur François Salachas a interpellé Emmanuel Macron lors d’une visite de ce dernier à l’hôpital de la Salpêtrière:
“Vous pouvez compter sur nous, l’inverse reste à prouver…”
Au plus fort de la crise du virus, le gouvernement a promis d’être à l’écoute des demandes des soignants et de mettre sur pied un plan massif pour sauver l’hôpital public. 30.000 décès plus tard, le gouvernement a lancé la consultation dite “Ségur de la santé” et a notamment invité les syndicats autour de la table. Ces derniers ont déjà fait part de leur mécontentement face au refus du gouvernement de prendre des engagements sur les revendications essentielles des soignants: augmentations de salaires pour tous, recrutements massifs et un plan d’investissement pour l’hôpital. Le gouvernement a, au contraire, proposé que les soignants — déjà surmenés et exténués — travaillent davantage d’heures, rappelant ainsi le fameux “travailler plus pour gagner plus.”
Infirmières, médecins, aides-soignants, et syndicats ont massivement appelé les citoyens — qui les applaudissaient à 20h à leurs balcons et fenêtres pendant le confinement — à venir leur apporter leur soutien lors d’une manifestation nationale le 16 juin 2020.
Hier, malgré le fait que cette manifestation se déroulait en semaine, 220 rassemblements se sont formés de Strasbourg à Fort-de-France en Martinique. 4000 personnes à Montpellier, 1000 à Clermont-Ferrand, 20 000 à Toulouse, 10 000 à Lyon ou 5000 à Strasbourg.
A Paris, environ 50 000 personnes (selon les organisateurs, 18 000 selon la police) se sont rassemblées devant le Ministère de la Santé avec dans leurs rangs les leaders syndicaux, des partis de gauche, des associations allant Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne (ATTAC) à la LDH mais également des artistes comme la célèbre metteuse en scène de théâtre Ariane Mnouchkine et sa troupe. À côté des citoyens, la majorité manifestait en blouse blanche ou blouse verte de chirurgie affichant des slogans tels que “blouse blanche, colère noire”, “sauvez nos structures,” “Covid-négative mais positive à la rage,” “nos vies plutôt que leurs profits,” “des sous pour la santé, pas pour les banques,” “le virus le plus dangereux est le capitalisme,” “masquée mais pas muselée” ou “sauvons les services publics.”
La manifestation avançant dans le calme s’est arrêtée un moment à la hauteur de la rue de Varenne, fermée par les forces de l’ordre, pour interpeller Matignon. Les organisateurs avaient déjà fait connaître leur souhait d’être reçu par le Premier Ministre afin de présenter leurs revendications. Refus silencieux. Les manifestants ont alors rappelé haut et fort la phrase prononcée par le neurologue Dr. Salachas:
“Cher Premier Ministre, vous avez pu compter sur nous pendant ces derniers mois. Pouvons-nous compter sur vous maintenant?”
Le Ministre de l’Intérieur, pour sa part, avait fait fermer trois des ponts sur la Seine et plusieurs stations de métro. Plusieurs milliers de CRS (harnachés des pieds à la tête de l’équipement dit “Robocop”, munis de lanceurs de grenades lacrymogènes et de LBD) étaient positionnés dans tout l’arrondissement et le suivant ainsi que sur les ponts.
Les manifestants ont débouché sur l’Esplanade des Invalides par le boulevard des Invalides remplissant lentement ses 1,5 km2 pour s’apercevoir que toutes les issues étaient barrées par des camions de CRS et des canons à eau.
Quelques minutes plus tard ont débuté sans sommations les jets de grenades lacrymogènes atterrissant au milieu des soignants éberlués et assourdis par les tirs répétés.
Aujourd’hui la presse relayait une information du Ministère de l’Intérieur selon laquelle il s’agissait d’une réponse aux agissements d’une centaine de manifestants antifa. On peut légitimement se demander pourquoi positionner à l’avance un nombre aussi considérable de CRS, nasser l’ensemble de l’Esplanade des Invalides, jeter des grenades lacrymogènes au milieu des soignants si l’objectif était de “neutraliser” une centaine d’éléments qualifiés de perturbateurs en marge d’une manifestation de plusieurs dizaines de milliers de blouses blanches?
Cette attaque injustifiée portée à ceux qui ont risqué leur vie et celle de leurs proches en luttant à l’hôpital contre le COVID-19 pour sauver les nôtres, ont profondément choqué les manifestants qui, contrairement à ce que le Ministère a fait savoir, étaient moins atterrés par les “éléments perturbateurs” que par la répression disproportionnée des CRS qu’ils ont sifflés et hués.
La violence entraînant la violence, les manifestants se sont soudainement retrouvés coupés en deux parties lors de l’irruption, au milieu de l’Esplanade à la hauteur de la rue de l’Université, des sinistres Brigades de répression de l’action violente motorisées portant casque intégral et frappant sans discernement. Des street medics ont immédiatement pris en charge les manifestants blessés au sol ou affectés par les gaz lacrymogènes, pendant que d’autres grenades étaient tirées et que les manifestants scandent “Macron, démission!”.
Scandalisés et poussés à bout par tant de violence après des mois d’efforts dans les hôpitaux contre le virus, des soignants ont tenté de résister voire de répliquer.
Une infirmière de 51 ans ayant lancé quelques pierres contre des CRS armés et harnachés jusqu’aux dents s’est vue immédiatement violemment arrêtée. Un journaliste est parvenu à filmer l’arrestation de cette femme en blouse blanche traînée au sol par les cheveux, poussée contre un arbre par plusieurs CRS avant d’être emmenée menottée dans le dos et la tête saignant, demandant en vain sa Ventoline. La preuve ainsi apportée de cette arrestation brutale, qui fait suite à de nombreuses autres à chaque manifestation parisienne, a ému population et figures politiques qui ont condamné cet acte.
La police a, plus tards, fait évacuer l’Esplanade par la seule sortie autorisée, en filtrant les manifestants un à un. Ultime humiliation : les soignants étaient tenus de retirer leur blouse blanche afin de pouvoir sortir.
À cette heure la seule réponse du gouvernement offerte aux soignants présents hier dans ces 220 rassemblements (malheureusement comme à tous ceux qui ont manifesté ces deux dernières années) semble être la violence des CRS. Elle est d’autant plus intolérable qu’elle est dirigée contre ceux qui ont sacrifié énergie, vie privée, santé, dans les hôpitaux, bien avant que le virus n’arrive, et parfois leur existence-même pendant la crise du COVID-19.
Or, la santé et l’hôpital public, que ce soit en France ou ailleurs en Europe, ne se relèvera pas sans investissements massifs de l’Etat. Suivez les propositions de DiEM25: 3-Point Plan !
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