Des milliers de gestes quotidiens de résistance pour en finir avec l’idéologie fasciste

Contre le culte fasciste de la violence, clamons : « vive la vie, mort à la mort ».
 
Samedi dernier, au plein cœur de la ville italienne de Macerata, un jeune homme, sympathisant d’extrême droite, a ouvert le feu contre Gideon Azeke, Jennifer Otiotio, Mahmadou Touré, Wilson Kofi, Festus Omagbon et Omar Fadera. La seule faute de ces hommes et de cette femme, âgés d’entre 20 et 32 ans, était la couleur de leur peau, ainsi que leurs origines africaines. Quelques jours auparavant, toujours à Macerata, le cadavre de Pamela Mastropietro, une jeune fille toxicomane, avait été retrouvé en plusieurs valises. Les suspects principaux d’un tel meurtre sont à présent deux dealers d’origines nigériennes. D’après ses propres déclarations, le tireur se serait donc livré à une chasse aux noirs précisément dans le but de venger la jeune fille, en tuant tous les immigrés qui vendent de la drogue. Les médias ont vite qualifié ce geste de folie, voire de crime passionnel, mais le cadre même d’un tel récit ne semble pas coller aux faits. Bien au contraire, par-delà toute vengeance, l’action du tireur visait à envoyer un message à ses compatriotes : l’immigration est une menace, surtout pour les plus faibles d’entre nous.
 
Hélas, un tel message semble avoir été promptement écouté. Les chefs de file de la droite « dure » italienne, notamment Matteo Salvini et Giorgia Meloni, ont saisi chaque occasion disponible pour marteler que, certes, il s’agit d’un geste criminel, mais que la responsabilité est, au fond, « à ceux qui ont rempli de réfugiés » l’Italie. Il est donc nécessaire d’appeler les choses par leurs noms : ce qui s’est passé à Macerata est bel et bien un acte de terrorisme fasciste, le plus grave depuis la fin des années de plomb. Il visait non seulement à semer la terreur parmi les personnes de couleur qui peuplent l’Italie, mais également à surenchérir sur le sentiment de peur qui semble hanter l’opinion publique italienne au sujet des questions migratoires. De plus, indépendamment de toute opinion politique et affiliation partisane, la manière théâtrale dont l’agresseur s’est lui-même livré à la police est empreinte précisément de ce qui constitue l’essence profonde de l’idéologie fasciste, c’est-à-dire un culte obscène de la mort. Pourquoi, donc, les principaux dirigeants politiques italiens semblent-ils refuser de reconnaître ce fait ?
 
En ce qui concerne le centre-gauche, la méconnaissance de la nature raciste et fasciste d’un tel acte n’est rien d’autre que l’aboutissement d’une suite de renoncements. Telles des prophéties autoréalisatrices, ces renoncements ont été la conséquence logique du constat que l’opinion publique italienne serait désormais acquise à un « sens commun » xénophobe et « anti-antifasciste ». C’est ainsi qu’une bonne partie des forces progressistes italiennes ont toléré l’émergence de ce que, en suivant Hannah Arendt, l’on pourrait appeler des « opinions raciales », et qui sont désormais en train de se souder en une véritable « idéologie raciale ». Le clivage entre différentes positions politiques se déplace ainsi du plan du problème à celui des solutions. Tout en n’entretenant pas nécessairement eux-mêmes des « opinions raciales », les différents acteurs politiques finissent par accepter un seul et même cadre discursif, dans lequel la question des politiques migratoires devient le problème fondamental.
 
On aura beau essayer de démontrer à force de statistiques l’ineptie de la thèse de l’invasion et du remplacement des peuples « natifs européens » par les immigrés africains. Comme nous le rappelle Hannah Arendt, une idéologie n’est pas une doctrine théorique, mais une arme de persuasion qui fait appel aux « nécessités politiques immédiates » des hommes et des femmes, c’est-à-dire à leurs expériences et à leurs désirs. On aura beau exhorter à la réflexion et au silence, comme l’a fait le maire de Macerata dans son appel à annuler le rassemblement antifasciste et antiraciste qui aurait dû avoir lieu le 10 février dans sa ville, par crainte des divisions et des violences qu’il aurait pu engendrer. Loin d’apaiser les conflits, le silence que le maire appelle de ses vœux risque de mettre encore plus en valeur les voix de ceux qui sèment la haine, car ces derniers occupent, en ce moment, une position de force dans le débat public.
 
C’est précisément pour cette raison que la bataille contre la barbarie qui s’est produite à Macerata devra faire appel non pas au silence, mais à des symboles puissants. À la violence des gestes pseudo-héroïques du tireur fasciste, il faudra opposer des milliers de gestes quotidiens de résistance, tandis que, au culte fasciste de la mort, il faudra opposer la formule par laquelle, dans les communautés zapatistes du Chiapas, on accueillit ceux que l’on considère comme étant des amis : « Vive la vie, mort à la mort » ! C’est pourquoi, en tant que DiEM25 Paris et DiEM25 France, nous regrettons la décision des organisateurs de suspendre le rassemblement. Nous invitons ainsi tous ceux qui veulent enrayer la course de notre continent vers la barbarie, à afficher leur solidarité aux victimes et à se rendre tout de même à Macerata, afin de manifester leur opposition à toute forme de fascisme et de racisme, dans une démarche de désobéissance constructive.
 
¡Viva la vida y muera la muerte!
 
Nicola Bertoldi, pour DiEM25 France

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