Démystifier les mythes autour de la population, de la pauvreté, et de la crise climatique

Le groupe de travail DiEM25 sur la paix et la politique internationale nous expose la façon dont les membres pensent que le mouvement devrait faire face à la crise climatique

La surpopulation est-elle la principale menace environnementale de notre temps? L’idée que les tendances démographiques mondiales et les taux de fécondité élevés, en particulier dans les pays à faible revenu, sont les principaux moteurs du changement climatique a gagné en popularité – en particulier dans les cercles réactionnaires. La plupart des membres de DiEM25 appellent le mouvement à démystifier ce mythe et à faire la lumière sur les liens entre population, croissance et pauvreté structurelle.

DiEM25 a posé cette question à ses membres dans le cadre du travail en cours pour développer un livre vert sur la paix et la politique internationale. Nous sommes reconnaissants de la large et riche participation des membres. Le groupe de travail traite actuellement toutes les contributions reçues et rédige un document qui sera présenté aux membres dans les mois à venir. D’ici là, nous partagerons certains des principaux débats dans le cadre de cette série d’articles.

Face à la menace de l’urgence climatique, certains adoptent une vision simpliste qui réduit le problème à une question de surpopulation. Ce récit réactionnaire, axé exclusivement sur la menace posée par les tendances démographiques mondiales et les taux de fécondité élevés, en particulier dans les pays non européens les plus pauvres,  a gagné une certaine notoriété politique.

Du côté droit de l’échiquier politique, de tels points de vue risquent de renforcer la notion de déclin occidental avancée par les populistes, les théories du remplacement et les nuances racistes sur la propension des «autres» cultures à avoir de nombreux enfants. L’utilisation de ce récit pour promouvoir l’eugénisme – l’idée grotesque que la reproduction de certains êtres humains  considérés comme «supérieurs» doit être promue au détriment de toutes les autres.

Nous souhaitons remettre en question ces vues déformées et discuter de la manière dont la pauvreté structurelle et l’absence de protection sociale dans les pays à faible revenu conduisent à des taux de fécondité élevés.

Pour commencer, les émissions de gaz à effet de serre sont très concentrées. Les dix pays (nous comptons l’UE comme l’un d’entre eux) avec les émissions absolues les plus élevées, ensemble, sont responsables de 73% de tous les gaz à effet de serre mondiaux rejetés dans l’air. On estime également que les 10% d’habitants les plus riches de la planète sont responsables de 46% de la croissance totale des émissions depuis 1990. « La surproduction et la surconsommation », soutient un membre de DiEM25, « sont des maux plus graves que la surpopulation. Et les deux premiers concernent principalement les pays occidentaux et les pays riches. » D’autres soutiennent « qu’il existe une corrélation directe entre la richesse d’une personne et la quantité de CO2 qu’elle produit. Un monde plus égalitaire produirait moins de CO2 ».

Les pays avec des taux de fécondité plus élevés et une population croissante émettent en moyenne moins par habitant que les pays avec un taux de fécondité plus faible et une population en baisse. La même tendance existe quand on regarde la consommation matérielle. Pourquoi? Parce qu’une fécondité plus élevée est souvent associée à des revenus plus faibles, ce qui signifie à son tour moins de consommation et d’émissions.

La crise climatique est davantage un problème lié aux revenus, aux modes de vie et à la consommation qu’à la croissance démographique

À mesure que les niveaux de revenu augmentent, la consommation et donc les émissions augmentent également, tandis que la fécondité tend à diminuer. Le fait de pointer du doigt exclusivement les pays à population croissante détourne l’attention d’autres facteurs plus conséquents.

Source: Not enough

Dans le même temps, la question de la croissance démographique ne peut être abordée hors de son contexte. Il existe un large consensus parmi les répondants à l’enquête DiEM25 sur le fait que la pauvreté structurelle, et non la culture ou la religion (comme veulent nous le faire croire les forces politiques conservatrices), est souvent corrélée à des taux de fécondité élevés.

Pour ceux qui sont confrontés à la misère, aux taux de mortalité infantile élevés et ne peuvent pas compter sur des mécanismes de protection sociale fonctionnels, avoir de nombreux enfants devient « une stratégie pour survivre » et assurer un soutien aux personnes âgées. Les répondants de DiEM25 soutiennent que « nous devrions éliminer la pauvreté abominable », avoir une « meilleure répartition des richesses » et plaider pour un « revenu de base à introduire au niveau mondial » pour répondre à la question.

En plus de se concentrer sur la pauvreté et les inégalités, beaucoup soulignent l’importance de promouvoir les droits et l’éducation des femmes: « lorsque vous éduquez les filles, promouvez les droits des femmes et créez des programmes de retraite, le taux de fécondité diminue ». Certains ont mentionné l’importance de la planification familiale et la manière dont la facilitation de la contraception et l’autorisation de l’avortement promeuvent les droits des femmes. Cependant, si la planification familiale est importante, plusieurs membres ont averti que de telles mesures ne devraient en aucun cas être imposées par des pouvoirs extérieurs ou légitimer le contrôle patriarcal sur le corps des femmes.

Nos membres se méfient également de l’utilisation de notions déformées de surpopulation pour promouvoir l’eugénisme, la suppression des droits reproductifs pour certains individus ou groupes considérés comme « inférieurs » ou « superflus ». Cette préoccupation a été renforcée au début de la pandémie COVID-19 qui a révélé un compromis cynique entre la croissance économique et la vie de citoyens qualifiés d’«inutiles »: les personnes âgées, les malades et certains autres groupes considérés comme un fardeau pour la société, car ils ne sont pas productifs et sont coûteux pour les systèmes de santé.

Source: Not enough

Les idées déformées sur la surpopulation ne doivent pas être utilisées pour nous distraire des problèmes socio-économiques

La surpopulation ne doit pas être utilisée pour déshumaniser certains individus ou groupes et nier leurs droits fondamentaux. La crise climatique, la pauvreté et la surpopulation sont considérées par la majorité des répondants comme les symptômes d’une économie mondiale dégénérative qui accumule la richesse entre les mains de quelques-uns tout en créant des inégalités, de la pauvreté, ainsi qu’une dégradation sociale et environnementale pour ceux qui restent.

Source de la photo: Pexels.

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